La vie économique.
Dès leur apparition, ils se concentrèrent majoritairement dans les domaines de la blanchisserie et de la restauration. Ils ouvrirent plusieurs de ces entreprises, car cela ne demandait pas un trop grand investissement financier et les risques de fermeture n’entrainaient pas de conséquences néfastes importantes. Il arrivait fréquemment que plusieurs Chinois s’associent dans un commerce de buanderie pour avoir assez d’argent afin de démarrer leur boutique. Les Chinois devaient travailler de longues heures pour être en mesure de mettre une certaine somme de côté. Il n’était pas rare qu’ils s’affairent de six ou sept jours par semaine et pendant plus de 14 heures par jour. Leurs tarifs étaient très bas pour attirer une clientèle locale, généralement, pas très fortunée. Pour diminuer les coûts et les déplacements inutiles, plusieurs de ceux-ci habitaient souvent dans de minuscules appartements adjacents à leur lieu de travail.
Dans une recherche réalisée par Nicolas Lanouette, étudiant en géographie de l’Université Laval, celui-ci constate qu’en 1901, tous les Chinois de Québec travaillent dans le domaine de la buanderie. 1 est chef de buanderie. 9 sont buandiers. 8 sont laveurs. 6 sont blanchisseurs. 2 sont commis de buanderie. Le nombre de blanchisseries chinoises augmente rapidement sur le territoire de la ville de Québec dans les premières décennies du vingtième siècle. En 1910, on dénombrait pas moins de 20 de celles-ci. En 1936, nous pouvions en compter une trentaine. En raison, entre autres, de la concurrence de plus en plus importante des buanderies commerciales et de la généralisation des appareils ménagers dans les foyers, le domaine de la blanchisserie chinoise sera sur le déclin avant la moitié du vingtième siècle. En 1974, il n’en demeurait qu’une en fonction sur le territoire de la ville.
Après quelques années de présence à Québec, certains Chinois amassèrent assez d’argent pour ouvrir de petits établissements de restauration servant des mets chinois modifiés pour convenir aux goûts des Occidentaux. En 1911, on retrouvait déjà deux restaurants chinois. Ce nombre quadruple en une décennie seulement. Effectivement, en 1921 huit restaurants chinois sont en activité. Cela s’explique par la popularité grandissante de la cuisine chinoise chez les Occidentaux. Durant les années vingt, le Chop Suey, met dont l’origine laisse place à de multiples théories, devint très apprécié un peu partout dans les villes Nord-Américaines. De plus, les anciens préjugés voulant que les Chinois servaient des rats et des chats à leurs clients s’estompait graduellement. De nouvelles recettes furent même créées par des restaurateurs chinois de Québec. Nous pouvons nommer, par exemple, la tourtière chinoise, les pattes de cochon à la cantonaise, la poutine chinoise et les nouilles frites à la québécoise. De 1920 à 1950, le nombre de restaurants chinois fut plutôt stable. Nous pouvons en compter 6, 7, ou 8 durant cette période. À partir des années soixante, le domaine de la restauration chinoise connait une croissance importante. Nous passons à 20 environs dans les années soixante et soixante-dix. En 1974, cette branche économique donne des emplois à presque 80 % de la communauté chinoise. Au début des années quatre-vingt, nous atteignons un sommet avec plus de trente restaurants dans la grande région de Québec. Par la suite, leur nombre décroit tranquillement. Les restaurants vietnamiens, thaïlandais, et cambodgiens viennent prendre la place laissée vacante dans le milieu de la cuisine asiatique. Aujourd’hui, nous pouvons compter sur les doigts d’une main le nombre de ceux qui demeurent en exploitation.
Pour ce qui est des autres commerces, nous pouvons repérer, dès le début du vingtième siècle, une épicerie (Kwong Hing) qui vend des aliments chinois, tel le thé. Nous y retrouvons aussi divers objets chinois (pinceaux, encre, bouliers-compteurs, etc.). Il y aura toujours en activité une ou deux entreprises de ce type pour répondre aux besoins de la communauté chinoise de Québec. Aujourd’hui nous pouvons encore localiser quelques petites épiceries qui commercialisent des produits asiatiques. Il est tout de même évident qu’il demeure plus facile de se procurer des articles provenant de la Chine dans une grande ville comme Montréal. La métropole jouera, tout au long du vingtième siècle, du monopole pour l’approvisionnement des magasins opérés par des Chinois dans tout l’est du Canada. Par mon observation personnelle, il semble qu’actuellement la nouvelle niche économique des immigrants chinois à Québec soit dans le domaine des dépanneurs.
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