communautés chinoises s’y installent plus ou moins rapidement.[1] Quand l’interdiction d’immigration des Chinois au Canada est déclarée par le gouvernement fédéral en 1923, ils se dénombrent entre 450 et 500 dans la ville de Québec.[2] C’était majoritairement des hommes seuls. Les femmes étaient très peu nombreuses. Le ratio de femmes et d’hommes sera toujours inégalitaire parmi cette population. Par exemple, en 1921 on compte une femme chinoise pour 19 hommes de la même provenance.[3] Selon le Père Adrien Caron, en 1934 la ville de Québec ne compte pas encore de Chinoises.[4] À partir des années vingt, le nombre de Chinois présent à Québec connaîtra une diminution progressive jusqu’à la fin des années quarante. Pendant toute la première moitié du vingtième siècle cette population demeure presque exclusivement masculine. Comme nous l’avons déjà mentionné, ce sont des motivations économiques à court terme qui expliquent leur présence dans cette ville. Comme la plupart des immigrants temporaires de cette époque, ils occupèrent, dans la majorité des cas, des emplois très peu valorisants et mal payés. Ils se concentrèrent dans les domaines de la restauration et de la blanchisserie. Ils ouvrirent plusieurs commerces dans ces domaines économiques, car cela ne demandait pas un trop grand investissement financier et les risques de fermeture n’entraînaient pas de conséquences néfastes importantes. Il arrivait fréquemment que plusieurs Chinois s’associent dans un commerce de buanderie pour avoir assez d’argent afin de démarrer l’entreprise. En 1910, on dénombrait pas moins de 20 buanderies chinoises à Québec.[5] Les Chinois devaient travailler de longues heures pour être en mesure de mettre un peu d’argent de côté. Il n’était pas rare qu’ils travaillent six ou sept jours par semaine et plus de 14 heures par jour. Leurs tarifs étaient très bas pour attirer une clientèle locale pas très fortunée elle non plus. De plus, ils logeaient souvent sur les lieux mêmes de leur travail. Pour éviter les dépenses inutiles, ils habitaient souvent plusieurs dans de minuscules appartements adjacents à leur lieu de travail. Après quelques années de présence à Québec, certains Chinois amassent assez d’argent pour ouvrir de petits restaurants servant des mets chinois modifiés pour convenir aux goûts des Occidentaux. Le Père Adrien Caron en compte 30 à Québec en 1936.[6]
Ils durent rapidement affronter l’hostilité d’une partie de la population blanche de la ville. Par exemple, en 1910 il existait une « Ligue Anti-Péril Jaune » ouvertement sinophobe à Québec.[7] Celle-ci était une branche de l’organisation de Montréal. Elle était toutefois moins virulente dans ses actions que sa contrepartie de l’Ouest canadien et des États-Unis.[8] Au Canada, cette organisation est née en 1907 à Vancouver pour contrer l’arrivée d’immigrants asiatiques au pays. Celle-ci apparut par la suite, dans diverses autres villes canadiennes.[9] Le Soleil du 9 juillet 1913 nous résume sa principale motivation. « La Ligue (contre le Péril Jaune) s’oppose absolument à l’immigration des Jaunes dans le Canada. Elle entend organiser des succursales dans toute la province de Québec… »[10] Comme à Montréal, des gens se plaignent de la concurrence supposément déloyale que cette population représente pour les commerçants occidentaux.[11] Plusieurs individus écrivaient dans les journaux pour dénoncer la présence
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[1] Pour connaitre les principaux lieux d’installation des communautés chinoises au Canada à cette époque, voir : CHAN, Anthony B. op. cit., 1983, p. 67-73
[2] Ibid., p. 96
[3] HELLY, Denise. op. cit., 1987. p. 122
[4] CARON, Adrien. « La mission chinoise de Québec » Bulletin de l’Union missionnaire du clergé, avril 1940, p. 226
[5] HOE, Ban Seng. Enduring Hardship : the Chinese laundry in Canada. Gatineau : Canadian Museum of Civilization, 2003, p. 59
[6] CARON, Adrien. Quelques notes sur les Chinois dans la Cité de Québec, Canada. Québec : Archidiocèse de Québec, Fond de la Mission Chinoise de Québec. (année inconnue)
[7] Ban Seng Hoe. op. cit., 2003. p. 60
[8] À ce sujet voir : THOMPSON, Richard Austin. The yellow peril, 1890-1924. New-York : Arno Press, 1978.
[9] ROY, Miki. Redress. Inside the Japanese Canadian call for justice. Vancouver : Raincoast Books, 2005. p. 10
[10] HOE, Ban Seng. Chinese Community, op. cit., 1980, p. 101
[11] HELLY, Denise. op. cit., 1987. p. 137
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