Travaux de chercheurs en histoire
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La propagande missionnaire en faveur de la mission au Xuzhou dans la première moitié du XXe siècle au Québec par Philippe Lamothe page 1 Introduction et méthodologie À l’image de nos « cousins » français débarqués au Canada il y a plusieurs siècles, les premiers missionnaires jésuites furent présents en Chine aux XVIIe et XVIIIe siècles. Après une longue pause causée par des changements politiques importants, les missions des jésuites y reprirent à la fin du XIXe siècle[1]. Toutefois, malgré la présence de 93 jésuites québécois en Chine au début du XXe siècle, l’historiographie de la propagande missionnaire en faveur de la mission au Xuzhou au Québec est dégarnie[2]. Serge Granger affirmait que « [tous] les auteurs qui ont étudié les relations entre le Canada et la Chine estiment que les missionnaires québécois ont constitué le groupe le plus influent qui s’est opposé à la reconnaissance de la [RPC] par le gouvernement canadien » dans sa monographie Le lys et le lotus : les relations du Québec avec la Chine entre 1650 et 1950[3]. Les historiens Shenwen Li et Samuel C. Fleury ont effleuré la propagande dans deux textes : « La revue missionnaire Le Brigand et les jésuites canadiens-français en Chine pendant la première moitié du XXe siècle » et « Le financement canadien-français de la mission chinoise des Jésuites au Xuzhou de 1931 à 1949 ». Ils décrivent le financement de la mission et le rôle déterminant de la diffusion des connaissances sur la culture et la société chinoises au Canada français[4]. L’ouvrage La muette éloquence des choses : collections et expositions missionnaires de la Compagnie de Jésus au Québec, de 1843 à 1946 de France Lord met en exergue le traitement des objets chinois et étrangers au Québec et l’apport de ceux-ci pour la propagande missionnaire[5]. Parallèlement, Le Ministère Pontifical des Missions : la Sacrée Congrégation de la Propagande d’Égide Roy élabore une conceptualisation sommaire de la propagande missionnaire au Québec lors de la première moitié du XXe siècle, mais cette monographie ne couvre pas l’épopée missionnaire au Xuzhou[6]. Les limites de l’historiographie permettent d’entrevoir une recherche originale en la question suivante : quelle fut l’étendue de la propagande des missionnaires jésuites en faveur de la mission au Xuzhou au Québec dans la première moitié du XXe siècle? La pertinence de cette question s’illustre par les contextes chinois et québécois de l’époque, affligés d’instabilité politique et de précarité économique en raison du krach boursier de 1929, la guerre sino-japonaise et la Seconde Guerre mondiale[7]. Au début du XXe siècle au Xuzhou, on dénombrait cinq millions d’habitants dont 95% de ceux-ci furent des agriculteurs ou des marchands[8]. Il s’agissait d’une population assez pauvre qui pouvait bénéficier grandement de l’aide des missionnaires jésuites québécois. Simultanément, la guerre sino-japonaise fut éprouvante pour la mission au Xuzhou puisque le territoire passa sous contrôle japonais le 19 mai 1938, et il en fut ainsi jusqu’en 1945. Après la guerre civile qui suivit la Seconde Guerre mondiale, la proclamation de la fondation de la République populaire de Chine par Mao Zedong le 1er octobre 1949 fut l’évènement qui sonna le glas de la mission puisque les missionnaires durent quitter le pays[9]. |
[1] Rosario Renaud, Süchow : diocèse de Chine, 1882-1931. Tome I, Montréal, Éditions Bellarmin, 1955, p. 49. [2] Jacques Langlais, Les jésuites du Québec en Chine, 1918 à 1955, Québec, Presses de l’Université Laval, 1979, p. 1. [3] Serge Granger, Le lys et le lotus : les relations du Québec avec la Chine de 1650 à 1950. Montréal, VLB, 2005, p. 128. [4] À ce sujet, on consultera Shenwen Li et Samuel C. Fleury, « La revue missionnaire Le Brigand et les jésuites canadiens-français en Chine pendant la première moitié du XXe siècle » dans G. Poirier, Textes Missionnaires dans l’Espace Francophone, Tome 2, L’envers du Décor, 2018, p. 139-154 - S. C. Fleury, « Le financement canadien-français de la mission chinoise des Jésuites au Xuzhou de 1931 à 1949 », 2014, p. 79. [5] La question de la propagande missionnaire est traitée indirectement dans France Lord, « La muette éloquence des choses : collections et expositions missionnaires de la Compagnie de Jésus au Québec, de 1843 à 1946 », 1999, p. 218-219. [6] Égide Roy, Le Ministère Pontifical des Missions : La Sacrée Congrégation de la Propagande. Québec, Les Missions Franciscaines, 1944, 32 p. [7] S. Li et S. C. Fleury, « La revue missionnaire Le Brigand et les jésuites canadiens-français en Chine pendant la première moitié du XXe siècle », op. cit., p. 140. [8] Édouard Lafortune, Canadiens en Chine : croquis du Siu-tcheou fou, Montréal, l’Action paroissiale, 1930, p. 20 - R. Renaud, Süchow : diocèse de Chine, 1882-1931, op. cit., p. 27 - G. Marin, La Chine à Dieu : une mission canadienne, le Siu-Tcheou-Fou. Montréal, Procure de la Mission de Chine, 1925, p. 5. [9] Shenwen Li, « Les jésuites canadiens français et leur mission en Chine, 1918-1945 », dans LI, Shenwen. Chine/Europe/Amérique: rencontres et échanges de Marco Polo à nos jours, Québec, Presses de l’Université Laval, 2009, p. 334. |
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